Par un arrêt du 19 juin 2024 (Cass. com., 19-06-2024, n° 23-13.546, F-D, Cassation), la Cour de cassation est venue rappeler :
Réponse de la Cour
« Vu les articles L. 332-1 et L. 343-4 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021, applicable en la cause :
6. Aux termes de ces textes, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
7. La capacité de la caution à faire face à son obligation, au moment où elle est appelée, s’apprécie par rapport aux biens et revenus de celle-ci.
8. Pour dire que la banque ne pouvait pas se prévaloir des cautionnements consentis par M. [P], après avoir relevé que ceux-ci étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus, l’arrêt énonce que la disproportion manifeste s’apprécie, au jour où la caution est appelée, uniquement au regard du patrimoine de cette dernière. Il ajoute que la banque n’apportant aucun élément concernant le patrimoine de M. [P], elle ne justifie pas de ce que le patrimoine de ce dernier, au moment où celui-ci est appelé, lui permette de faire face à son obligation.
9. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les revenus de M. [P] ne lui permettaient pas, à la date où il a été appelé, de faire face à son obligation, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
Aux termes de cette décision, la Cour de cassation censure la Cour d’Appel qui n’avait pris en compte que le patrimoine de la caution pour déterminer si celle-ci pouvait faire face à son engagement au moment où elle était appelée en paiement.
La Cour de Cassation juge que pour déterminer si un cautionnement est disproportionné au moment où la caution est appelée en paiement, il faut prendre en compte le patrimoine de la caution, comme le prévoyait l’article L 332-1 ancien du code de la consommation mais pas seulement. Il convient également de prendre en compte ses revenus au moment où elle est appelée en paiement.
A noter que ces dispositions ont été abrogées depuis l’ordonnance du 15 septembre 2021 (Ord. 2021-1192 art. 32).
Sous l’égide des anciennes dispositions du code de la consommation, un créancier professionnel ne pouvait se prévaloir d’un cautionnement donné par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution ne lui permette de faire face à son engagement lorsqu’elle est appelée à l’exécuter (C. consom. art. L 314-18, L 332-1 et L 343-4).
En cas de disproportion manifeste de son engagement, la caution était intégralement libérée.
L’ordonnance du 15 septembre 2021 abroge ces textes (Ord. 2021-1192 art. 32), pour leur substituer une disposition unique intégrée dans le Code civil qui maintient l’exigence de proportionnalité du cautionnement lors de sa conclusion entre une personne physique et un créancier professionnel (C. civ. art. 2300 nouveau).
Toutefois, le créancier ne perdra pas toute possibilité de se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné : ce dernier sera réduit au montant à hauteur duquel la caution pouvait s’engager à la date où elle s’est engagée. Il y a donc un rééquilibrage entre les intérêts du créancier (le cautionnement n’est pas totalement inefficace) et ceux de la caution (elle ne pourra pas être poursuivie pour le tout, même en cas de retour à meilleure fortune).
Ces nouvelles dispositions sont applicables aux cautionnements souscrits postérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance précitée, soit les cautionnements souscrits après le 1er janvier 2022. Pour les cautionnements souscrits antérieurement à cette date, les anciennes dispositions du code de la consommation restent applicables.